Dans le contexte actuel de faible niveau des taux d’intérêt, il n’y a plus grand-chose à grappiller pour l’épargnant: c’est pourquoi les économistes parlent aussi de «dépossession» de l’épargnant.
Un coup d’œil aux taux d’intérêt moyens qui sont proposés actuellement semble confirmer cette analyse: un compte d’épargne pour adulte ne rapporte ainsi plus que 0,08% en moyenne arithmétique, comparé à un rendement de 0,27% pour un compte du pilier 3a, de 0,09% pour un compte de libre passage et de 0% pour un compte privé.
Toujours plus de personnes qui épargnent pour leur retraite se tournent dès lors vers des fonds de prévoyance qui promettent des rendements significativement plus élevés. Cela s’explique aussi par le fait que les banques essaient de rendre ces fonds appétissants pour leurs clients.
Rien d’étonnant à cela: les fonds sont lucratifs pour les banques. «Néanmoins, au moment de choisir des fonds de prévoyance appropriés, mieux vaut faire preuve d’une certaine prudence», avertit Benjamin Manz, le directeur de moneyland.ch. On constate en effet des différences prononcées entre les différents fonds, comme le montre l’enquête ci-après.
Des fonds de prévoyance avec des différences prononcées
moneyland.ch a analysé les conditions, les coûts et les rendements de 68 fonds de prévoyance suisses (vous pouvez vous faire envoyer gratuitement le tableau sous forme de fichier PDF en remplissant le champ figurant en bas d’article).
Résultat: les coûts sont relativement élevés avec une moyenne de 1,18% (en prenant en considération les frais pertinents au cours d’une durée de dix ans). Pour certains fonds, les frais d’ensemble peuvent toutefois s’avérer encore significativement plus élevés – c’est particulièrement le cas avec des échéances courtes.
Les rendements des fonds de prévoyance ont été significativement plus élevés au cours des dix dernières années que ceux des comptes d’épargne 3a. Au regard de la performance réalisée par les marchés des actions durant cette période, cela n’a toutefois rien de surprenant. Pour les dix dernières années, la règle générale qui prévaut est que les fonds dotés d’une part en actions importante ont davantage rapporté pour l’épargnant.
Les frais administratifs des fonds de prévoyance
Le ratio du total des frais sur encours, ou Total Expense Ratio (TER) en anglais, sert à indiquer les frais d’ensemble récurrents d’un fonds (y compris les frais administratifs). Effectivement, le ratio TER reste un chiffre clé décisif pour pouvoir évaluer les coûts.
Néanmoins, en général, tous les coûts ne sont pas compris dans le chiffre-clé TER - contrairement à ce que son nom pourrait suggérer. Ainsi, selon les prestataires, il arrive qu’il soit nécessaire de compter aussi avec d’autres coûts externes comme les droits de garde (aussi appelés frais de dépôt) ainsi que les commissions d’émission et de rachat.
Les frais TER des fonds examinés varient d’un faible niveau de 0,24% jusqu’à un niveau élevé de 1,69% par an. Exemple de calcul: avec un capital de prévoyance de 50'000 francs, les clients paient avec un TER de 1,69% pas moins de 845 francs par année. Chez la plupart des prestataires qui proposent des fonds de prévoyance, la règle qui prévaut est que plus la part en actions est importante, plus le TER sera élevé.
Fonds de prévoyance passifs et actifs en comparaison
Hormis la composition du fonds (même si c’est surtout la part en actions qui est ici décisive), il faut aussi tenir compte d’un autre facteur de coûts important: les fonds passifs sont en général significativement meilleur marché que les fonds gérés de manière active. C’est pourquoi il vaut mieux, en général, privilégier les fonds de prévoyance passifs. Malheureusement, les prestataires qui proposent des fonds de prévoyance en Suisse n’incluent, jusqu’à présent, qu’un choix restreint de fonds de prévoyance passifs dans leur offre. Cela s’explique en fin de compte aussi par le fait que ces prestataires gagnent moins d’argent avec des fonds passifs à faibles coûts.
Attention aux frais de dépôt
Beaucoup de clients ne savent pas qu’en plus des frais généraux des fonds (TER), il est aussi possible que des coûts supplémentaires pour les droits de garde de la banque de dépôt viennent s’y ajouter. Exemple: à la Fondation de la Bâloise, les droits de garde correspondent à 0,2% de la fortune de placement par année, tandis qu’ils atteignent 0,25% par an à la Banque Cantonale de Lucerne, 0,3% par an à la Banque Cantonale de Zurich, 0,45% par an (selon les fonds) à la Banque Cantonale de Berne (mais au moins 50 francs par an) et alors qu’ils s’élèvent même à 0,25% par trimestre chez Swiss Life (donc 1% par an).
Frais d’émission et de rachat
Selon les prestataires, il arrive, qu’en plus du TER et des droits de garde, que des frais d’émission et de rachat soient encore prélevés. Il s’agit de frais qui sont facturés soit au moment de l’achat (dans le cas des frais d’émission) et/ou lors de la vente (pour des frais de rachat). Les frais d’émission et de rachat pèsent davantage lors de la prise en considération d’une courte période étant donné qu’il s’agit de charges uniques. Pour ces deux catégories de frais, il existe à nouveau deux variantes: ils peuvent être calculés soit à l’avantage du fournisseur (la variante la plus défavorable pour le client), soit en faveur de la fortune du fonds.
Les prestataires qui prélèvent des frais d’émission sont, entre autres, la Banque Cantonale de Lucerne (0,4%), la Banque Cantonale de Zurich (ZKB) (0,65% mais 1000 francs au plus), Raiffeisen (1% au maximum), Bâloise (1%), la Banque Cantonale de Berne (0,25 à 1,5%, mais au minimum 50 francs), Zurich (2% au maximum), Swiss Life (jusqu’à 2%, sans frais pour les opérations en ligne) et la Mobilière (2% au maximum). Les commissions de rachat sont, elles, plus rarement facturées, entre autres à la Banque Cantonale de Zurich, chez Reichmuth & Co ainsi qu’à la Banque Cantonale de Berne. «Evitez les fonds avec des frais d’émission et de rachat élevés», conseille Benjamin Manz.
Comparer les coûts totaux
La comparaison des coûts est un élément décisif pour choisir le bon fonds de prévoyance. En effectuant cette comparaison, tous les frais et coûts pertinents devraient être pris en compte, parmi lesquels figurent aussi le Total Expense Ratio, les droits de garde ainsi que les frais d’émission et de rachat. Toutefois, il est difficile pour le non spécialiste d’effectuer une telle comparaison des coûts, étant donné que certains frais sont récurrents tandis que d’autres ne sont prélevés que de manière unique.
C’est pourquoi moneyland.ch a procédé à une simulation des coûts portant sur une somme de 100'000 francs pour une période de dix ans (en partant de l’hypothèse que la fortune du fonds reste constante). Selon les fonds, il résulte pour cette période des coûts totaux compris entre 2400 et 17’800 francs. Les fonds les plus chers coûtent ainsi plus de sept fois plus que les meilleur marché d’entre eux.
Les rendements des fonds sous la loupe
On constate d’importantes différences non seulement en ce qui concerne les coûts des fonds mais aussi à propos des rendements de ceux-ci. «Un résultat important est que la performance passée réalisée par un fonds ne permet pas de tirer de conclusion au sujet de sa performance future», rappelle Benjamin Manz. En effet, la performance d’un fonds est fortement corrélée avec l’évolution des marchés des actions, qui ne peut être prévue par personne. Les coûts sont, eux, facturés indépendamment de l’évolution des marchés.
moneyland.ch a analysé notamment les données de la performance cumulée pour des périodes d’une année ainsi que de 3, 5 et 10 ans. Etant donné que les marchés des actions ont réalisé de bonnes performances au cours de cette période, les fonds de prévoyance dotés d’une part en actions élevée ont aussi généré de meilleurs rendements. Exemple des dix dernières années: durant cette période, les chiffres de la performance cumulée ont varié entre un minimum de 21,39% (CSA Mixta-LPP Basic comportant une part en actions de 0%) et un maximum de 61% (Swiss Life LPP-Mix 45 avec une part en actions maximale de 50%).
Ces rendements, élevés en apparence, perdent de leur superbe lorsqu’on les compare durant la même période avec quelques ETF ou indices actions concurrents. Ainsi, le SMI (indice de performance) a affiché durant le même intervalle une hausse de 84%, tandis que la progression a même atteint 140% pour le S&P 500.
Net Performance: des chiffres de performance ajustés
Les chiffres officiels servant à mesurer la performance prennent certes en compte les frais TER mais ils ne déduisent pas d’autres coûts éventuels. Etant donné que la performance ajustée de l’ensemble des coûts n’est nulle part publiée, moneyland.ch a simulé ceux-ci à l’aide de calculs de modélisation. La Net Performance est ici nettement plus modeste pour les fonds caractérisés par des droits de garde, des frais d’émission et de rachat élevés que la performance officielle affichée. Exemple avec le Swiss Life LPP-Mix 15: pour ce fonds, la performance cumulée officielle au cours des cinq dernières années s’élève à 15,96%, alors que la performance simulée par moneyland.ch, après déduction de l’ensemble des coûts, n’atteint plus qu’encore 9,03%.
Des conseils pour choisir le bon fonds de prévoyance
«De manière générale, vous ne devriez opter pour un fonds de prévoyance que si vous investissez sur le long terme et que vous êtes prêt à prendre un risque», recommande Benjamin Manz. Pour les fonds dotés d’une part en actions élevée, les clients devraient laisser cet argent reposer pendant au moins dix ans.
La prudence est aussi de mise dans la manière d’interpréter les chiffres de la performance passée: en effet, celle-ci ne permet de tirer aucune conclusion à propos de la performance future du fonds. Si, par exemple, les marchés des actions devaient s’effondrer ces prochaines années, les fonds de prévoyance dotés des parts en actions correspondantes ayant généré de bons rendements par le passé seront ceux qui subiront des pertes élevées.
Dans une première étape, les preneurs de prévoyance devraient choisir une stratégie de placement qui leur est adaptée. Quelqu’un qui est d’avis que les marchés des actions vont continuer de progresser durant les prochaines années peut opter pour un fonds doté d’une part importante en actions – tout en étant conscient du risque élevé auquel il s’expose.
Dans une seconde étape, la comparaison des coûts est décisive: «Pour sélectionner le fonds approprié, les preneurs de prévoyance devraient être particulièrement attentifs à la structure des coûts et choisir un fonds présentant les coûts d’ensemble les plus modestes», recommande Michael Burkhard, analyste chez moneyland.ch.
Le comparatif des fonds de prévoyance indépendant de moneyland.ch permet d’obtenir une comparaison d’ensemble des coûts. De manière générale, les fonds passifs bon marché sont à préférer aux fonds actifs plus onéreux.
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